Revue de Presse écrite par Jean Marie Willigens
Stereo (Allemagne)
Mai 2002
La couverture du Stereo de mai aurait pu être belle à s'en faire un poster. Imaginez une superbe platine avec un épais plateau de métal à la tranche parfaitement nickelée, et un 3009 prêt à pivoter en direction du couvre plateau réalisé dans un cuir nappa magnifiquement rouge brique.
Mais le photographe n'a rien trouvé de mieux que de poser sur le nappa deux baladeurs en fausse imitation de simili ersatz de plastique métallisé, et ça jure un peu, même s'il faut s'approcher assez près pour distinguer les noms des fabricants -qui jurent aussi...
Et, en plus, la promesse de couverture n'est tenue qu'à moitié à l'intérieur, car si la belle platine y est effectivement présentée en détail, c'est avec un bras Rega. De SME, point l'once d'une mention. Cela fait donc désordre. Où allons nous si les allemands se relâchent, je vous le demande!
M'enfin, si vous aimez les belles machines, les gros plateaux bien épais et lourds (treize kilos), le métal qui brille, les pages 64 à 69 vous rendront heureux. La bestiole est une Acoustic Solid, marque souabe que l'on voit fréquemment dans les magasins tendance (sur la toile: www.sws-audio.de ), le modèle est la "Machine small". Il semble qu'il faudra retenir ce nom: La bestiole tourne bien, est touiquable presque à l'infini, par exemple par ajout de bras, et s'avère très bien sonner (hors une légère aggressivité dans les aigus, qui fera préférer des cellules rondouillantes plutôt qu'acidifiantes). Elle récolte une note de 63%, soit à peine moins qu'une Roksan Xerses et plus qu'une Transrotor Sirius. Et comme, en version de base, avec un RB 250, elle ne coûte que 1400 écus, voilà un redoutable concurrent pour MM. Räke (Transrotor) et Suchy (Clearaudio).
Signe des temps et des moeurs qui se dégradent, on trouve aussi les baladeurs de couverture à l'intérieur, et sur sept pages, qui plus est! Le résultat n'est point trop brillant, mais l'article explicite à peu près clairement les différences dans les formats (trois) et les algorithmes de compression utilisés (au moins trois). Relevons tout de même que c'est le baladeur Technics "classique", cad sans compresion et sur CD de taille normale, qui l'emporte sur les modèles Sony, Sharp et Grundig en nouveaux formats. Il est, de plus, le moins cher du lot.
Bon, revenons à des choses plus sérieuses. Enfin, sérieuses... C'est que l'on peut avoir un sourire sceptiquement narquois devant le enième constructeur présenté comme un ancien super-ingénieur des laboratoires militaires d'Union Soviétique, élevé à la triode depuis son sevrage de sa babouchka, longtemps responsable des programmes ultra-secrets de guidage des fusées les plus redoutables, mais exilé il y a quinze ou vingt ans, avec dans sa poche assez de doubles triodes ultra-secrètes pour faire dorénavant le bonheur des audiophiles capitalistes...Ne rigolez pas, le mieux c'est que ces vitae sont au moins à moitié vraies, et puis on s'en fout de toute manière pourvu que la "triode secrète pilotant autrefois les SS21" sonne correctement. Pour celles de Viktor Khomenko elles sonnent vachement bath*, ou plutôt BAT, c'est le nom de sa boite.
Les tubes sont des 6H30B dans le préampli VK30SE et des 6C33 dans l'ampli VK-75. Le montage est présenté comme un "single ended bridge" si novateur qu'aucun journaliste ne se hasarde à l'expliquer, le poids est énorme, les dimensions incompatibles avec n'importe quel HLM, les performances dignes d'une c.e.p. de 3,5m en version ICBM, mais d'après Stereo, purée que ça sonne!
Outre le dégagement de chaleur (450W de consommation au repos, mais plus vous les faites marcher, plus vous économisez, classe A oblige!), il y a un hic: Le prix, qui atteint dix huit mille nouveaux écus pour la combi, et encore, sans la télécommande ni le module phono pour le pré...Mais les concurrents à ce niveau de 95%, tous à totors d'ailleurs, sont au moins aussi chers. Le Klimax, par exemple, lui aussi coté à 95%, est au moins moitié plus coûteux que le VT75.
Et si vous n'avez pas les moyens, ni la place dans votre F3, Stereo pense aussi à vous: Deux pages sur l'intégré à tubes Synthesis Shine (Fase) à 2600 écus. Petit, mignon, bien fini, pas trop puissant, légèrement enrobé de loukoum suave dans son image sonore, mais avec du punch et de la mélodie. La note: 79%, celle d'un Marantz PM14, lui confère un bon rapport qualité/prix.
Encore moins chers, bien qu'en éléments séparés, les combinés ampli-prémpli des deux grandes marques d'entrée dans l'audiophilie, NAD et Rotel. Comptez dix kilopinays pour les NAD 160 et C270, ou RC/RB 1070. Stereo a été emballé par les performances et la musicalité de l'ensemble NAD, qui reçoit quatre étoiles et l'épithète d'excellent, tandis que les Rotel ne sont jugés que bon ou très bon.
Stereo n'avait testé jusqu'ici qu'une poignée de lecteurs SACD, tous d'origine Sony ou Philips/Marantz. Un premier fabricant allemand -Lindemann- se lance à son tour, mais avec un appareil "audiophile", exclusivement stéreo. Manifestement parfaitement fini et équipé du bloc Sony OM4, ce lecteur D680 est vendu quelque 8000 écus. Il semble les valoir, puisqu'il s'établit d'entrée en tête de peloton, avec 100%.
Du côté des enceintes, la plus petite et logeable de celles présentées est l'Audiodata "Partout", gràce aussi à sa géométrie parfaitement symétrique autout d'un HP coaxial. Elle n'est pas donnée (2500 écus), mais la qualité sonore d'Audiodata est au rendez-vous, elle récolte une note de 86, au niveau d'une JMLab Elektra 806 et à un point d'une Animata.
En revanche, pour les pyramides ESS, hautes de 93cm, les problèmes de logement sont plus sérieux. Le modèle testé, l'AMT1E ne paraît guère différer de l'AMT 1 présenté il y a trente ans par Oskar Heil et dont le tweeter "à plis pinceurs" avait fait sensation. Et il n'a, de fait, pas été sensiblement modifié par l'ancien ingénieur d'AMT qui a relancé la firme de Sacramento. C'est sans doute pour ça que la rédaction, tout en saluant les indéniables qualités sonores du transducteur, préfère le ranger parmi les "classiques", voire "nouveaux vintages", à écouter derrière des dinosaures de l'ampli totor des années 70, tels les GAS ou les Phase linear, et sous un poster de Harley...et ne pas lui donner de note.
Encore plus gros et bien plus lourds que les ESS, les Clearlight Symphony ont une vague allure de Watt & Puppies (quoiqu'avec un aigu à ruban inspiré du Air Motion Transformer). Leur originalité n'est pas là, mais dans leur matériau. Clearlight est l'inventeur du RDC, un matériau composite particulièrement peu résonant, dont Thorens fait désormais ses boitiers de platines HDG, voire ses coquilles de bras. Sur les Symphony, le RDC est utilisé exclusivement pour le coffret médium aigu, tandis que pour celui du HP de basses il est associé à des parois latérales de 40mm d'épaisseur.
La paire de Symphony coûte à partir de 15.000 écus (sensiblement plus pour la très belle version laque piano), mais Stereo constate que l'association de très bons chassis de médium et aigu (ce dernier recevant une mention d'excellence à lui seul) et d'un matériau hautement inerte lui confère des qualités exceptionnelles: La Clearlight reçoit 98% comme note, se plaçant ainsi entre une BW 800 (ou une Utopia, elle aussi créditée de 100%) et une BW 801, qui n'atteint elle "que" 95%!
Outre quelques autres tests de matériels plus ésotériques, telle la laveuse de microsillons Blue Danube ou le cable rigide Streamline de Fadel, ce numéro de mai de Stereo comporte, High End oblige, pas mal de brèves et d'annonces pour des matériels qui y seront en première mondiale. Très pratique, les URL des constructeurs y sont souvent indiquées.
Très intéressant entretien avec M. Sennheiser, père des micros du même nom
On apprend aussi que c'est désormais Linn qui sonorise la voiture de James Bond. Après Renault-Cabasse et Phaeton-Burmeister, il y aura Aston-Mart(l)inn.
Bonnes écoutes
* "bath", expression assez utilisée peu après Marie-Chantal. Origine contestée. Généralement accompagnée de l'adverbe vachement ou (moins fréquent) furieusement. A quasiment disparu au plus tard sous Pompidou.